C. La répartition

La vaisselle en métal la plus courante est en cuivre (Ur, Kish, Tell Ahmar, Khafadjé, Abu Salabikh), rares sont les exemples en bronze (Ur, Mari) ; les objets précieux sont en argent, en or et en electrum (Ur, Umm el-Marra). Les coupes sont majoritairement en cuivre/bronze, certaines exceptions sont en argent ou en or (Umm el-Marra, Ur)1908.

Les contextes de découvertes de la vaisselle en métal sont soit funéraires, soit cultuels (les temples). Ces contextes suggèrent donc une utilisation rituelle des récipients, et une signification symbolique de leur présence dans la tombe. Les objets sur lesquels nous avons insisté, parmi les nombreuses formes présentes, en particulier dans le cimetière d’Ur, sont liés à la libation et à la fonction de boire.

La vaisselle en métal ne remplace pas la vaisselle de terre cuite ; dans les tombes du Cimetière Royal, elle tend à la supplanter avec la vaisselle en pierre1909. C’est un trait de richesse accentué si les récipients sont en or ou en argent. À Umm el-Marra, la vaisselle de métal est représentative par le matériau utilisé et par les formes présentes. Dans la tombe 1, au niveau inférieur 3, une coupe en argent accompagne le corps E ; dans la tombe 4, la vaisselle se compose d’une aiguière et de coupes en argent. C’est l’unique site de cette région qui présente, au Bronze Ancien, un ensemble en argent, avec une aiguière. Mari, la plus méridionale des cités du Moyen-Euphrate, montre des affinités avec les cités du Sud1910. Seul le tombeau 300 possède de la vaisselle en métal, en bronze : une aiguière en bronze (M.1480), un plat (M.1482), deux vases (M.1484, 1486), des bols en bronze (M.1485, M 1488). Les récipients sont situés dans les amas extérieurs de la sépulture. L’aiguière est placée à côté de M.1437, la jarre en « Scarlet Ware », son ouverture devait être fermée par un bol renversé ; dans ce même amas se trouve la hache en croissant. Dans l’amas 3, se trouve le vase M. 1484 ; dans l’amas 5 sont regroupés le vase M. 1486, les bols.

L’aiguière en métal appartient à une tradition du sud mésopotamien, elle se répartit sur très peu de sites (type 2 : Ur, Kish, Kafadjé, Uruk, al Uqair1911), dans des tombes ou des temples. À Ur et à Kish, elle est dans les tombes dites « royales ». Il est intéressant de trouver cette forme dans une cité de taille moyenne telle que Umm el-Marra. La position géographique, au croisement de routes commerciales, suppose que la cité possède des contacts commerciaux, voire politiques avec des cités méridionales ; l’élite locale s’est enrichie du commerce et recherche le raffinement1912. La forme de l’aiguière indique qu’elle est sans doute une importation provenant du Sud, elle constitue dans le contexte funéraire, un trait de prestige pour son possesseur. L’hypothèse de la pratique d’un rituel associé à ces formes à bec est probable, mais le plus certain, c’est le prestige que représente la possession d’un objet de cette qualité. L’étude du complexe funéraire a montré la présence d’une société hiérarchisée, avec une élite particulièrement dynamique et s’imposant entre autre par un ensemble de rituels (les sacrifices de chevaux) originaux pour la cité.

À Ur, d’après les travaux de Müller-Karpe, des associations d’objets apparaissent : la corrélation entre l’aiguière et la patène est signalée par Winter1913. La marmite, le chaudron ou des grands récipients avec une anse (type 41)1914 sous certaines variantes, apparaissent dans toutes les tombes d’Ur, sauf de rares exceptions (tombes 779, 789, 1068, 1142, 1266). La tombe 779 est peu pourvue en vaisselle ; celle-ci se trouve dans la petite chambre C, à droite de l’entrée. Une « louche » (type 94) fait partie de cet amas, ce qui laisse supposer que la tombe a été vidée en partie dans l’antiquité, comme la tombe 789. La tombe 777, appartenant à la même phase que la tombe 779, possède une association de trois marmites, d’un chaudron à anse, d’une « louche » et d’une passoire, d’un gobelet et de bols. Les grands récipients sont très souvent associés à la passoire. C’est un objet avec un long manche ; elle est associée à l’usage de la bière ainsi qu’une longue paille dans la tombe 800, connue par les représentations de la glyptique1915.

Quatre tables sont réparties dans deux tombes. Dans la tombe 800, deux « tables d’offrande » sont placées aux pieds du cercueil, la troisième est à gauche du cercueil, dans un amas à l’angle Nord de la chambre. Les deux premières tables sont associées à une aiguière, des gobelets empilés et des bols ; la dernière est à proximité d’une « lampe » et de gobelets. Dans l’angle Est de la chambre, sont regroupés les gros récipients (marmites et chaudron). Dans la tombe 1130, une table d’offrande en cuivre est déposée dans la fosse, contre la paroi Nord-Est, à proximité d’une « lampe », d’une marmite et d’autres offrandes (hache, bandeaux, lyre, céramiques). Il s’agit de deux tombes de femmes ; dans deux cas, les « tables » sont associées à des « lampes » et dans deux cas avec des aiguières et des gobelets. Ces « tables d’offrande » sont selon nous un réceptacle pour un liquide ou un contenant pour liquide.

Les coupes deltoïdes en or, argent et en cuivre sont présentes dans les Tombes Royales (tombes 337, 789, 800, 1054, 1236, 1237) ; elles sont peu représentées dans les Tombes Royales de la première phase du Cimetière (tombes 777, 779, 1618, 1631, 1648)1916. La tombe de Meskalamdug en possède deux dont l’une porte une inscription. Les coupes dans les tombes 263, 1130, 1157, 1312, 1407 sont en cuivre ; se sont des tombes parmi les plus richement pourvues. Dans les tombes d’enfants (tombes 1068, 1133) il n’y a pas d’aiguière, ni de coupe deltoïde, seulement des gobelets, des bols et des vases en métal et en pierre. Les coupes deltoïdes ne semblent pas être associées à un type de matériel particulier ; en effet dans les tombes individuelles, à l’exception des tombes 755 et 1130, il n’y a pas d’aiguière ni de table d’offrande. La constatation est identique pour les tombes individuelles possédant des coupes en pierre ou en coquillage. Le gobelet et le bol sont les objets les plus courants dans la vaisselle.

Notes
1908.

Annexe 4-B, graphique 14.

1909.

Annexe 4-B, graphique 15.

1910.

Jean-Marie 1989 : pl. XIV.

1911.

Müller-Karpe 1993 : 13-25, pl. 1-7.

1912.

Cf. suprachapitre 1, II.

1913.

Annexe 4-B, graphique 16.

1914.

Müller-Karpe 1993 : 192-206, pl. 115-124.

1915.

Beyer  1996 : 21-26.

1916.

Une coupe en coquillage est présente dans le matériel de la tombe 1648.