3.2 La politique de change

Le taux de change est le prix d'une monnaie par rapport à une autre (ou plusieurs) monnaie(s) étrangère(s). Son système de détermination résulte d'un choix politique et économique. Les politiques de taux de change allaient de l'inconvertibilité, qui signifie que tout rapport explicite entre la monnaie nationale et étrangère est aboli, à une détermination par le marché suivant la loi de l'offre et de la demande des monnaies. L'Algérie obéissait à la première catégorie, c'est-à-dire, l'inconvertibilité du Dinar Algérien.

Les rapports entre la monnaie nationale et les monnaies étrangères interviennent à deux occasions : les échanges internationaux de biens et services et les mouvements de capitaux. Ces deux types de transactions matérielles et monétaires s'organisent sur un marché où la monnaie nationale est échangée (comme n'importe quelle marchandise) avec les monnaies étrangères et inversement. Par conséquent, le choix du système de change, de la fixation du taux de change et le contrôle des opérations de change font appel à la politique monétaire appliquée par l'institut d'émission pour la régulation du stock de monnaie existant à chaque instant dans l'économie.

Dans un système économique régi par les lois libérales de création et de répartition de richesses, quatre variables interviennent systématiquement pour définir et expliquer la détermination du taux de change (flexible ou flottant). Ces variables sont : la parité du pouvoir d'achat (la PPA), l'équilibre de la balance de paiement, la parité des rendements anticipés des actifs financiers et l'équilibre des portefeuilles d'actifs financiers.

La Banque Centrale, étant libérée de toute tutelle, intervient par le biais de ces quatre variables dans la détermination de l'offre et de la demande de monnaie, donc du taux de change. A contrario, dans un système planifié tel que celui de l'Algérie, la Banque centrale fixe elle-même un taux de change constant par rapport aux autres monnaies et /ou contrôle elle-même les opérations de change. Ceci suppose une gestion administrative par rationnement de la demande de monnaies étrangères par les agents économiques.

En Algérie, le taux de change est fixé par l’Etat en tenant compte, non des rapports de prix avec l'extérieur mais de celle du contrôle du Dinar en fonction d'un panier représentatif des échanges extérieurs. La politique choisie est justifiée, officiellement, par le souci de protéger l'économie nationale des fluctuations des monnaies de ses partenaires. Mais à en croire certains auteurs65, cette option est prise pour éviter à l’Etat une limite de l’émission monétaire, car il comptait utiliser en toute liberté et aux proportions qu’il souhaite la rente pétrolière pour le développement économique. A ce propos, l’histoire économique algérienne nous apprend que l’utilisation de la planche à billets pour une émission monétaire sans aucune limite économique ou institutionnelle - au mépris de toute rationalité économique- est une des caractéristiques fondamentales des pratiques économiques de l’Etat algérien, à savoir du volontarisme économique dont nous tenterons de cerner les principaux contours dans le cadre de ce chapitre66.

Notes
65.

L. Addi souligne à ce propos «  En refusant la convertibilité du dinar avec les monnaies étrangères, l’Etat algérien souhaitait émettre de la monnaie sans avoir à honorer des engagements avec l’étranger, ce qui l’aurait contraint à limiter l’émission monétaire. Mais il souhaitait surtout mobiliser les ressources énergétiques pour le développement économique et éviter ainsi qu’elles ne soient transférées, sous forme de capitaux à l’étranger », L. Addi, L’Impasse du populisme… Op.cit. p. 199.

66.

Nous reviendrons en détails sur la place du pouvoir monétaire dans les pratiques du développement de l’Etat algérien dans ce qui suivra.