1.2 Déficit de la balance commerciale et dépendance de la rente et des importations

L’analyse de la structure du commerce extérieur algérien est parmi les indicateurs les plus illustratifs de l’état de dépendance importante de l’économie algérienne, à la fois de ses ressources pétrolières et des importations. L’étude de la structure des importations et des exportations algériennes durant cette période permet en effet de montrer à la fois la faiblesse de l’offre locale, l’importance de la demande nationale en produits importés et enfin l’importance de la rente pétrolière dans la couverture du déficit de la balance commerciale.

Nous remarquons, à partir de la figure 3.1 ci-dessous,que les exportations ont connues une baisse continuelle qui a duré jusqu’en 1966. Les raisons principales d’une telle évolution étaient d’une part, le recul de la production agricole, suite à l’installation anarchique des paysans sur des terres déclarées vacantes, d’autre part, la suppression des avantages tarifaires accordés par la CEE aux produits agricoles algériens. Cette situation ne concernait pas que la paysannerie algérienne. L’ensemble de la société a en effet traversé une phase d’expectative face à l’évolution « inattendue et incompréhensible » des « nouvelles » orientations politiques et économiques du pays. Au moment où elle s’attendait à une répartition « égalitaire » des richesses promise par le discours populiste du FLN durant la guerre de libération, elle assistait à une lutte sans merci pour le pouvoir et les privilèges, une fois l’indépendance acquise, ainsi qu’a la volonté de mettre sous la coupe étatique les richesses nationales.

Graphique 3.1 Exportations, importations et solde commercial (1966-1978).

Source.Construit par nos soins à partir des données deH. Benissad,Economie du développement de l’AlgérieOp.cit.p. 183. Données auxquelles nous avons rajouté les taux de couvertures des importations par les exportations.

A la lecture de la figure ci-dessus, on constate un formidable essor des exportations à partir de 1968. Cela n’est pas dû, comme on pourrait le croire, à une amélioration des capacités de production locale, mais à l’amélioration des recettes des exportations de pétrole qui ont rapporté en 1967 une valeur équivalente à 2 605 millions de DA contre 1 819 millions de DA en 1966. Cette tendance haussière s'est maintenue, comme le montre le graphique suivant illustrant l’évolution des exportations du pétrole, durant la période 1967-1978.

Graphique 3.2 Evolution des exportations énergétiques et leur part dans les exportations totales (1967-1978).

Source.Construit par nos soins à partir des données deH. Benissad,Economie du développement de L’Algérie …Op.cit.p. 189.

Tout comme les exportations, les importations n’ont pas cessé de décroître jusqu’à 1966. Cette tendance à la baisse est due au départ massif des étrangers et par conséquent à la baisse des importations qui leur étaient destinées; mais aussi à la mise en application, dès 1963, du premier code tarifaire et contingentaire qui a contribué à la baisse des importations, notamment celles des biens de consommation finale qui représentaient en 1961 environ 58 % des importations totales.

En revanche, à partir de 1967, nous assistons à une augmentation nette des importations (voir Figure 3.1). Ceci s’explique d’une part, par la mise en exécution des plans de développement, d’autre part, par l’augmentation des prix des produits importés suite à des stratégies de riposte mises au point par les pays industrialisés dans le but d’effacer les effets de l’augmentation des prix de pétrole. En effet  entre 1970 et 1974, la plupart des prix des produits alimentaires ont connus une augmentation important, à l’exemple des es prix du blé et des produits plastiques qui ont plus que triplé, ceux du sucre roux ont été quintuplé, ceux des produits sidérurgiques ont été multiplié par 2,44, ceux des équipements ont augmenté de 80 à 85% 96 . Par ailleurs, cette augmentation considérable des importations de produits alimentaires s’explique aussi par l’incapacité de l’offre locale à assurer la demande en augmentation suite à l’accroissement du salariat, notamment industriel et urbain.

Bien que la structure des exportations algériennes ait connu un changement radical en l’espace de quelques années, la vulnérabilité qui caractérisait l’économie algérienne a été maintenue car les exportations restaient concentrées sur un seul produit, le pétrole qui s'est substitué aux produits agricoles : le sous sol s’est substitué au sol pour reprendre les termes de A. Dahmani 97 .

Notes
96.

CF, A. Brahimi, L’Economie algérienne. Op.cit. p. 149.

97.

CF,A. Dahmani, l’Algérie à l’épreuve…Op.cit. p. 33.