Chapitre 4. Des premiers réaménagements à la crise ouverte (1980-1988) 

Le slogan officiel du premier « mandat » de Ch. Bendjedid résumait parfaitement l’esprit des réaménagements économiques du début des années 1980 : « Le changement dans la continuité ». Le changement s’imposait car  la stratégie de développement précédente venait de perdre son principal architecte, en l’occurrence H. Boumediene. Le décollage économique promis tardait à venir et la situation socio-économique de la population ne cessait de se dégrader. Mais la continuité s’imposait aussi parce que le régime politique n’envisageait pas de se démarquer de ses conceptions politiques et idéologiques de l’organisation et des fonctions du système économique. Résultat : la continuité a pris le pas sur le changement.De prime abord, rappelons qu’au lendemain du décès de H. Boumediene, la nouvelle équipe dirigeante conduite par Ch. Bendjedid avait procédé à la réalisation d’un bilan économique et social de l’expérience des années 1970. Les conclusions de ce bilan, le premier de l’Algérie indépendante, furent accablantes pour les « industrialistes» dont le poids politique fut sans commune mesure, du coup d’Etat de juin 1965 à la mort de Boumediene en décembre 1978.

En guise de solution, la nouvelle équipe dirigeante proposait des réaménagements qualifiés officiellement de « réformes ». Les résultats de cette « nouvelle » orientation économique furent, de l’avis unanime des observateurs, au dessous des objectifs affichés.  Cependant, cette première tentative de « réforme » n’a pas été sans dividendes politiques pour ses initiateurs. Elle a permis au centre politique de réduire le poids de sa périphérie et au président Chadli d’écarter des centres de commande ses principaux rivaux tout en se renforçant par de nouvelles clientèles...

Chemin faisant, l’Algérie a été frappée en 1986 de plein fouet par le contrechoc pétrolier : la baisse simultanée des prix du pétrole et de la valeur du dollar américain a provoqué immédiatement une chute de près de la moitié des recettes en devises. Des réformes économiques s’imposaient à nouveau. L’Etat devait trouver des solutions urgentes et pourquoi pas radicales à ses problèmes économiques dont la persistance menaçait directement la stabilité politique du régime132. C’est dans ce contexte que fut mis en place, en 1987, une cellule de réflexion sous la direction de Mouloud Hamrouche, alors secrétaire général du gouvernement, puis de la présidence. La mission de cette cellule consistait de trouver les solutions adéquates aux dysfonctionnements de l’économie algérienne.

L’objectif de ce chapitre est de fournir une analyse de ces différents réaménagements initiés durant la décennie 1980. Il sera question de présenter le contenu des différentes actions initiées, leurs impacts réels sur l’appareil productif et leurs principales conséquences sociales et politiques.

Notes
132.

Dans le langage officiel, on parlait de menace sur la stabilité de l’Etat.