Sociologie de l’engagement et des cadres de l’action

Nous nous sommes également intéressés aux différents travaux ouverts par certains psychologues dont l’analyse sociologique est particulièrement aiguisée149, ainsi que de nombreux sociologues, sensibles à la « posture clinique », appartenant au CRESAL (plus particulièrement ceux de Jacques ION, Bertrand RAVON, Christian LAVAL et Pascale PICHON), autour des mutations du travail social et des transformations de la relation d’aide. Ces travaux mettent notamment en évidence que les cliniciens constituent aujourd’hui autrui en « personne ». Ce faisant, cette personnalisation de l’individu reposerait à la fois sur les types d’engagement clinique dans la relation d’aide (engagement bénévole, associatif, caritatif, intellectuel) et sur un certain nombre de supports d’attachement (qu’il reste à rendre visibles) travaillés dans la relation d’aide.

L’engagement des acteurs se donne à voir d’une part à partir des charges critiques portées par ceux qui se trouvent « au front de » (du travail social), d’autre part à partir des cadres (dispositifs et/ou institutionnels) par lesquels les acteurs s’attachent aux individus en souffrance. Interroger l’engagement des acteurs d’un dispositif ne vise pas seulement pour nous à comprendre le pourquoi (les objectifs affichés de l’action, la visée poursuivie), il s’agit de partir également du comment, c'est-à-dire de l’observation du fonctionnement détaillé du (ou des) groupement(s) et des façons dont les individus y agissent150. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi de prêter tout particulièrement attention aux modalités concrètes des pratiques d’association dans ce groupement (lieux, heures de réunion, traces écrites, processus et signaux d’entrée et de sortie du collectif, signes d’appartenance, prises de parole, formes de représentation, etc.), et le sens que les acteurs donnent à leurs pratiques ou, comme le dirait Jacques ION, « ce que les acteurs disent des processus par lesquels ils s’associent avec d’autres, focalisant ainsi le regard sur les rapports que les individus entretiennent et disent entretenir avec les collectifs dont ils font partie »151.

Notes
149.

Cf. par exemple la finesse des descriptions ethnographiques et des récits d’expérience clinique présents dans l’ouvrage d’Emilie HERMANT, (2004), op. cit.

150.

ION J., (2001), L’engagement au pluriel, Publications de l’Université de Saint-Etienne.

151.

Ibid, p. 15