I. Naissance du CSMP : la « souffrance psychique » comme nouvel objet d’intervention

‘« Le Carrefour Santé Mentale Précarité (CSMP) est un dispositif intersectorisé de concertation et de coordination élaboré par le CPA [Centre Psychothérapique de l’Ain] afin de répondre aux besoins spécifiques des personnes démunies en matière d’accès aux soins et à la prévention. »
Projet d’Etablissement du CPA 2003-2007, 20 décembre 2002, p. 60.’

Suivent plusieurs mois au cours desquels la question des moyens de l’intervention, en termes de ressources humaines, de structures, de statuts, et de moyens d’action, est débattue : comment tisser les mailles du réseau avec des personnalités extérieures au CPA, notamment avec les acteurs du social (institutionnels et professionnels de terrain)189 ? Comment articuler le sanitaire et le social et instaurer une intervention commune au niveau départemental190 ? Comment mettre en place des actions de réinsertion, axées sur d’autres registres que le soin, le travail et le logement191 ? A travers ces différentes interrogations, les membres du CSMP sont soumis assez rapidement à un dilemme : étayer, alors qu’elles s’inscrivent de plus en plus dans la temporalité de l’urgence et de la gestion de crise, les différentes formes de relation d’aide que mettent en œuvre les professionnels de l’action sanitaire et sociale au front de la précarité, mais aussi parier sur le long terme et soutenir la recherche de nouvelles formes d’organisation (en termes de dispositifs et de pratiques) qui seraient reconnues par leurs pairs. Ce travail d’étayage de la relation d’aide et de ses modalités de cadrage donne à voir les tensions entre le dedans et le dehors de la psychiatrie, entre une temporalité de l’urgence et une temporalité de la durée, entre le soin et l’organisationnel, ce qui inscrit d’emblée l’intervention du CSMP dans un travail de mise en visibilité de ses activités diverses et variées.

‘« Ce dispositif, comme son champ d’intervention, garde sans doute aux yeux de certains l’apparence d’une nébuleuse d’idées, de contacts, de réalisations ponctuelles, dont la cohérence peut n’apparaître pas très visible. Rappelons qu’il s’agit de poursuivre un travail de sensibilisation à la clinique de la précarité et de l’exclusion, et de rassemblement des initiatives et des actions qui se multiplient dans le quotidien, dans ce domaine. C’est aussi un travail de prise de conscience : beaucoup de soignants travaillent, et plutôt bien, dans ce champ psychosocial sans forcément en posséder les clés et « font de la précarité » comme M. JOURDAIN faisait de la prose. »
Rapport annuel 2002 du CSMP, janvier 2002, p. 1.’

Notes
189.

Compte-rendu de la réunion plénière du 21 janvier 2000.

190.

Compte-rendu de la réunion plénière du 14 mars 2000.

191.

Rapport des Groupes de travail à l’élaboration du second projet d’établissement, 2001, p. 61.