Chapitre 2 – Les activités du CSMP : l’émergence d’un dispositif de connaissance

Ce chapitre vise à établir un inventaire raisonné (organisé et analytique) des activités du dispositif CSMP : quelles sont ces activités, comment sont-elles agencées, comment ont-elles émergé dans l’histoire du dispositif, que signifient-elles et que font-elles faire ? Il ne s’agit pas tant d’analyser ici la manière dont fonctionne le dispositif mais plutôt de dégager les principales lignes de force qui le traversent.

En s’inscrivant dans le cadre de la Loi de lutte contre les exclusions et plus précisément dans l’article 71 concernant les PRAPS, l’objectif général du CSMP est de « faciliter l’accès à la prévention et aux soins des personnes en situation de précarité et d’exclusion sociale ». L’analyse conduit à distinguer quatre objectifs plus spécifiques :

  1. sensibiliser les professionnels sanitaires et sociaux du CPA à la clinique de la précarité ;
  2. étayer des échanges de pratiques entre professionnels de structures d’hébergement et professionnels du CPA ;
  3. appuyer la mise en œuvre de réseaux institutionnels locaux traitant de la problématique « santé mentale précarité » ;
  4. favoriser la prise en charge et l’accompagnement aux soins des personnes en situation de précarité et d’exclusion sociale.

La mise en évidence de ces quatre objectifs nous a permis de construire un organigramme totalisant les activités et l’organisation du CSMP.

Note méthodologique sur ma posture de recherche
Au cours de ma période dans le terrain de recherche, j’ai commencé assez rapidement à analyser les activités du dispositif CSMP, ne serait-ce que pour me situer dans un vaste ensemble d’activités qui n’étaient organisées par aucune plaquette de présentation, aucun organigramme. De cette analyse, quatre axes organisationnels d’activités ont été distingués. Ces quatre axes sont donc issus de mes analyses des activités du CSMP. Cependant, ils ont ensuite été en partie repris, en 2007, par les membres du bureau du CSMP pour mieux rendre visible leurs activités aux yeux de leurs partenaires et bailleurs. Nous voyons évidemment bien ici une des propriétés (organisationnelle) attribuées à ce travail de thèse par les membres du CSMP, une propriété de traduction par l’analyse sociologique, certainement dans une recherche de continuité des traductions opérées, comme nous l’avons vu dans le chapitre précédent, par les sociologues de l’ORSPERE.
Pour sortir du biais méthodologique qui consisterait à analyser mes propres productions, mon analyse ne portera pas tant sur ces axes organisationnels que sur les activités qu’ils viennent encadrer. Je ne prendrai donc pas ces quatre axes comme des catégories issues du terrain (et à analyser) mais comme des entrées (construites par moi-même) pour dresser l’inventaire des activités du CSMP.
Repérons parallèlement, que la sociologie, telle qu’elle est mobilisée par les référents du CSMP, semble être un opérateur de traduction à la fois entre les mondes de la psychiatrie et du travail social, et entre les « mondes » de l’expérience clinique et de l’organisation de la clinique.

Au cours des neuf années d’existence du dispositif, la transformation des activités mises en œuvre par les référents donne à voir certains mécanismes de pouvoir auxquels ils sont soumis en tant qu’agents de l’institution hospitalière. Comme nous avons commencé à le voir dans le chapitre 1, face à ces mécanismes de pouvoir, les membres du CSMP ont développé progressivement un ensemble d’expérimentations fondées sur une stratégie de lutte qui les ont amenés à des modes d’activité par lesquels ils se sont construits et affirmés. C’est au regard de ce processus que nous analyserons dans ce chapitre les différentes activités parcourant le dispositif CSMP.