Projets d’AAH et de mise sous curatelle

Selon Mme BON, la demande de mise sous curatelle est assez rapidement rejetée sur motif que celle-ci doit être formulée par la famille lorsqu’elle est présente. Le problème, selon l’assistante sociale, c’est que si la famille formalise la demande, c’est à elle ou à la personne concernée par la demande que reviennent les charges d’expertise tandis que lorsque cette demande est formulée par une institution, c’est l’Etat qui prend en charge ces frais. Du coup, les familles, bien souvent elles aussi en situation de précarité financière, refusent de formuler toute demande de mise sous curatelle. Toujours selon Mme BON, cela vient en même temps compliquer des relations familiales qui participent la plupart du temps au processus de précarisation. En ce qui concerne Emilio, il venait tout juste de retrouver ses filles lorsque la demande de curatelle a été formulée.

Lors de son séjour dans l’unité « Epidaure », des contacts familiaux ont, en effet, pu être réinitialisés grâce aux recherches et à la médiation effectuées par l’équipe soignante. Cela faisait plusieurs années qu’Emilio n’avait pas rencontré sa famille, il ne savait pas, entre autres, qu’il était grand-père. D’après l’infirmière qui a assisté aux retrouvailles, Emilio est resté « stoïque », pratiquement incapable de « lâcher une émotion », faisant comme s’il avait quitté ses filles la veille. Un lien a été cependant rétabli par l’équipe soignante, lien reconnu par les filles d’Emilio. Fier d’avoir apporté une ébauche de reconstruction au tissu familial d’Emilio, c’est alors que l’équipe soignante spécifie, dans sa demande de mise sous protection, que le contact avec la famille d’Emilio a été renoué. « Erreur » nous explique Mme BON : « J’avais mis ses coordonnées [de la fille d’Emilio] dans le dossier, le juge les a vues et du coup il a tout renvoyé. Et moi derrière, j’ai fait un courrier à la fille en lui donnant toutes les coordonnées des médecins experts mais je pense qu’elle ne l’a jamais fait. D’une part les liens entre eux étaient trop précaires et ce n’est jamais simple de mettre son père sous protection. C’est vraiment pas facile de faire ça. D’autre part, il n’avait peut-être pas l’argent nécessaire. Donc c’est tombé à l’eau. »

Concernant la demande d’AAH, plus d’une année plus tard, l’assistante sociale n’a toujours pas de réponse « cela prend toujours plus de temps, et il n’y a pas qu’Emilio dans ce cas-là » précise-t-elle.

Elle décide alors de reprendre le « projet social de sortie » à travers la formalisation d’un « projet d’hébergement ».