2.1 Etalement et émergence de formes urbaines polycentriques

La métropolisation a provoqué des profondes modifications sur les systèmes de transport et de localisation. Le phénomène de transition démographique, caractérisé par un fort accroissement de la différence entre taux de natalité et taux de mortalité, a été généré en partie par des phénomènes liés au processus de métropolisation dans les villes européennes du 18ème siècle. En effet, l’industrialisation de la production permise par l’apparition de rendements croissants, l’augmentation des rendements agricoles, la mise en place de réseaux de transport entre les lieux de production et de marché et enfin les progrès de la recherche (dans le domaine médical notamment) ont fortement amélioré les conditions de vie de la population dans les domaines de la santé et de l’alimentation. Il s’en est suivi une importante croissance démographique des populations au sein des grandes villes. Cette croissance, conjuguée à l’aménagement d’axes de transports ferroviaires a permis l’étalement urbain de la population. Ce phénomène s’est amplifié à partir des années 1950 en France avec le développement progressif de l’usage de l’automobile et l’attrait des ménages pour l’habitat individuel. La baisse des coûts généralisés de transports, l’augmentation moyenne du revenu des ménages et l’augmentation des prix du foncier (concurrence accrue de l’occupation du centre) impulsés par les trente glorieuses ont accéléré la migration des ménages du centre-ville vers les zones périurbaines.

La métropolisation a également profondément modifié la nature des fonctions économiques présentes au centre-ville. Historiquement, le cœur de la métropole polarisait l’ensemble des grandes fonctions économiques de la ville, cette dernière étant « monocentrique, centrale et polyfonctionnelle » (Corade, Lacour, 1995). Cependant, on a vu que les centres-villes se sont progressivement spécialisés à l’international, en concentrant exclusivement les grandes activités de coordination et de décision. De nombreuses activités ont été délocalisées en périphérie, notamment celles relatives à l’exécution mais également les services à la personne et aux entreprises. Une grande partie des emplois a ainsi progressivement migré en périphérie. Cependant, les établissements délocalisés sont toujours sous l’effet d’économies d’agglomérations qui ont tendance à les regrouper. Avec cette « déconcentration concentrée », on assiste à la création d’une forme urbaine polycentrique et monofonctionnelle (Lacour, 1996 ; Aguiléra et al. 1999 ; Gaschet, 2001). L’émergence de ces pôles secondaires se manifeste un peu partout dans les villes européennes et américaines. Certaines métropoles adoptent même des configurations « polycentriques polyfonctionnelles » suite au déclin progressif du centre et à la reproduction des fonctions centrales au sein des pôles secondaires (Garreau, 1991 ; Hartshorn, Muller, 1989; Alvergne et Coffey, 1997). La profonde restructuration économique initiée par la métropolisation s’est donc traduite par une restructuration spatiale des emplois et une modification de la forme urbaine. L’émergence de structures polycentriques s’est notamment manifestée par une forte augmentation de la proportion des déplacements en voiture vers la périphérie ainsi qu’une augmentation des distances parcourues (Madre, Maffre, 1997).