2.3 Conséquences sur le système de relations sociales et le système de transports

L’ensemble des impacts de la métropolisation sur l’organisation et la localisation des entreprises et des ménages, évoqué ci-dessus, concerne le sous système de localisation de l’espace urbain, que nous identifions à la forme urbaine de la métropole. Ces changements ne sont pas sans conséquences sur les deux autres sous systèmes urbains qui composent la ville, c’est-à-dire ceux des relations sociales et des transports.

La métropolisation entraîne des modifications dans le sous-système des relations sociales qui ne sont pas sans conséquences sur la mobilité (Ascher, 1995, 1998). La métropole permet la multiplication des objets et des pratiques sociales : les individus ont plus de choix parmi les biens de consommation qu’ils achètent et parmi les activités qu’ils peuvent pratiquer (vie associative, culturelle, loisirs). Comme les contraintes pesant sur les individus sont de plus en plus lâches (liberté que confère l’usage de la voiture particulière, horaires de travail plus flexibles), chaque citadin peut se composer un mode de vie « à la carte » au sein du grand hypermarché des modes de vie (Ascher, 1995, p.122). Cette multiplicité d’options offertes par la métropolisation a une conséquence principale sur les modes de vie des individus : l’individuation. Cela se retrouve par exemple au sein des familles : même lorsque la solidarité et le lien familial restent très forts, chaque individu a tendance à gagner en autonomie et à construire sa propre vie. Chacun possède son propre cercle d’amis, de parcours, d’activités et de lieux de vie. En dehors de l’univers familial, les relations de proximité tendent à perdre de l’importance au profit d’un mode de vie beaucoup plus individualiste : le voisin est de moins en moins un ami ou un collègue de travail. En fait, le territoire social urbain de chaque individu (Ascher, 1998) est progressivement passé de l’échelle du quartier à l’échelle de la métropole. Cela a été rendu possible par l’augmentation généralisée de la vitesse de communication fournie par les différents réseaux de la métropole, qu’ils soient physiques (transports) ou virtuels (TIC).

En réaction aux profondes mutations du système des relations sociales et surtout du système des localisations, le système de transports a évolué au cours du 20ème siècle. Le processus historique de la métropolisation décrit précédemment peut ainsi être mis en parallèle avec la transition urbaine, c'est-à-dire le passage de la ville pédestre à la ville automobile (Wiel, 1999). Cette transformation s’est effectuée en respectant globalement la conjecture de Zahavi (Zahavie, Talvitie, 1980), qui stipule que le temps quotidien passé dans les transports reste constant et qu’en conséquence tout gain en vitesse se traduit par un allongement des distances parcourues.

Sur le plan de la mobilité quotidienne, et en rapport avec les évolutions du sous système des relations sociales, il y a deux conséquences : une baisse de la proportion des déplacements liés au travail, au profit des déplacements de loisirs ou liés aux affaires personnelles, et surtout une forte croissance de la distance de ces déplacements (Orfeuil, 2000a). Toutefois les migrations alternantes continuent à structurer fortement les pratiques quotidiennes des personnes et restent très pertinentes pour analyser l’inscription spatiale des pratiques de mobilité et l’analyse des liens entre forme urbaine et mobilité (Aguiléra, 2010).

Dans ce contexte, les impacts de la métropolisation sur la mobilité quotidienne des ménages sont particulièrement importants. Globalement, cette dernière a connu une forte croissance. Cependant, on a aussi constaté une augmentation des inégalités, des dépenses et des émissions de gaz à effet de serre qui lui sont associées.