3.2.d Une nette périurbanisation des emplois…

La périurbanisation des emplois en France s’est effectuée parallèlement à celle de la population à partir des années soixante. Les causes de ce mouvement sont multiples : pression foncière au centre, externalités négatives au centre (congestion et pollution notamment), accessibilité routière en périphérie, baisse des coûts généralisés de transports (Boiteux, Huriot, 2002). De plus, elle est extrêmement variable selon les secteurs d’emplois concernés. Nous étudierons plus en détail dans une partie ultérieure les logiques qui guident ces mouvements migratoires d’emplois.

F. Lainé (1998), à partir de l’analyse des transferts intercommunaux d’établissements met en évidence un desserrement des activités. Sur la période 1989-1992, puis 1993-1996, on note un solde négatif pour la ville centre, tandis que les soldes sont positifs pour la banlieue et la périphérie. L’auteur observe également un effet taille : plus l’aire urbaine est grande et plus le desserrement observé est important. Ce phénomène de « concentration-débordement » montre que plus une ville est grande, plus son étalement est important (Terrier, 1987, 1996). Ainsi, pour les aires urbaines de plus de 500 000 habitants, le taux de croissance moyen du nombre d’établissements en ville centre était de -2 % tandis qu’en couronne périurbaine, il s’élevait à +2,5 %.

Mignot et al. (2004), en étudiant la répartition cumulée des emplois à partir du centre-ville au niveau communal, pour les quatre recensements (1975, 1982, 1990, 1999), mettent en évidence une plus forte croissance de l’emploi en périphérie qu’au centre-ville dans sept aires urbaines françaises. De plus, selon la configuration urbaine, le desserrement observé des emplois n’est pas le même. Il peut être diffus, dans le cas d’une aire urbaine monocentrique, ou bien localisé dans des pôles secondaires. Nous avons repris le cas de trois grandes agglomérations de province (Mignot et al. 2007) : Lille, Lyon et Marseille. L’étude de la répartition cumulée des emplois (à partir des communes) pour tous les recensements depuis 1975 donne les résultats suivants :

Graphique II-3 : répartition cumulée des emplois à Lille, Lyon et Marseille pour les recensements Insee de 1975, 1982, 1990 et 1999
Graphique II-3 : répartition cumulée des emplois à Lille, Lyon et Marseille pour les recensements Insee de 1975, 1982, 1990 et 1999

Source : traitement auteur à partir du recensement INSEE (1999), dans Mignot et al. 2007, p. 43

L’analyse des graphiques II-3 est semblable à celle donnée pour la population L’étalement le plus important s’est effectué sur l’aire urbaine de Lyon : les emplois à la périphérie ont beaucoup augmenté. L’allure de la courbe de répartition cumulée de l’aire de Marseille est bien caractéristique avec un saut qui correspond au pôle secondaire d’Aix-en-Provence. L’étalement à Marseille est un peu moins important : la présence du pôle secondaire d’Aix en Provence limite cet étalement en polarisant une partie des emplois périphériques. Enfin, Lille s’illustre par une série de petits sauts correspondant à plusieurs pôles secondaires dont notamment Villeneuve d’Ascq, Roubaix et Tourcoing. L’étalement y est le moins important. Une fois encore deux hypothèses sont avancées : soit l’aire urbaine de Lille « bute » sur d’autres aires urbaines à proximité, soit la présence et le fort développement des pôles secondaires entre 1975 et 1999 a pu retenir en partie la suburbanisation des emplois. Ces résultats montrent à nouveau, que selon la configuration urbaine, les formes de l’étalement urbain ne sont pas les mêmes.