4.5.b Effets sur les choix modaux

Un certain nombre de travaux se sont également focalisés sur l’influence des polarités secondaires sur les choix modaux. L’avantage de ces études est de raisonner systématiquement à l’échelle désagrégée de l’individu qui constitue l’unité de décision du déplacement (Handy, 1996). En outre, ils se basent sur un cadre conceptuel solide issu de la théorie micro-économique. Les résultats montrent globalement un usage accru de la voiture dans les pôles.

Schwanen et al. (2001) examinent l’influence des caractéristiques de la zone de résidence (classifiée plus haut) sur le choix modal en distinguant selon plusieurs motifs de déplacement (travail, achats et loisirs). Les trois régressions logistiques montrent un usage plus important de la voiture dans les pôles périphériques quel que soit le motif de déplacement. La configuration « Cross Commuting », bien que présentant des distances de déplacement plus courtes, est aussi moins adaptée à l’usage des transports publics. En effet, ces derniers sont plus adaptés pour des liaisons radiales centre-périphérie. Ce constat légitime une organisation polycentrique en réseau, où l’ensemble des pôles secondaires sont reliés par des liaisons non radiales de lignes de transports. Une étude semblable réalisée par Schwanen et al. (2002) montre également que l’usage de la voiture est plus important dans les zones suburbaines. Cependant, l’inconvénient des deux approches précédentes est que l’identification et la classification des pôles est trop grossière et est effectuée à l’échelle nationale.

Plus récemment, Vega et Reynolds-Feighan (2008) ont examiné l’influence des pôles sur les choix modaux dans la région de Dublin. Les auteurs identifient les pôles d’emploi en examinant les variations des résidus après application de la loi de Clark sur la répartition spatiale des emplois (McDonald et Prather’s, 1994). Une fois ces pôles identifiés, ils sont caractérisés par la répartition sectorielle des emplois qu’ils contiennent. Ces pôles apparaissent tous fortement spécialisés, soit dans les activités de commerces, soit dans les industries manufacturières. Une régression logistique est ensuite menée sur les caractéristiques socio-économiques du ménage. L’originalité de cette étude est d’introduire des variables muettes à la zone de destination du déplacement (dans un centre secondaire ou non) et d’introduire également le coût marginal du déplacement, ainsi que le temps de déplacement. Les résultats montrent naturellement un effet négatif du coût et du temps de déplacement sur l’usage de la voiture. Les pôles plus éloignés et plus spécialisés présentent des distances de déplacement aux destinations plus importantes que dans les pôles plus centraux. D’une manière générale, ces travaux pointent également l’absence d’offre alternative de transport pour les déplacements non radiaux. Or ce sont eux qui ont le plus augmenté en proportion ces dernières années (Madre, Maffre, 1997).

Nous avons jusqu’à présent recensé des travaux portant sur l’influence de la densité sur la mobilité. Nous avons constaté que la densité est un indicateur trop global regroupant de nombreux effets différents, d’où l’idée de regarder ce qui se « cache » derrière la densité. De plus, les travaux ont montré l’intérêt de travailler à une échelle fine d’observation.

Nous nous sommes ensuite intéressés à l’influence du polycentrisme sur la mobilité quotidienne des ménages. Les différents travaux recensés montrent qu’il est difficile de trancher sur l’intérêt ou non d’une forme urbaine polycentrique pour limiter l’usage de la voiture et la longueur des déplacements. L’effet de « rétention » d’un pôle est controversé. Néanmoins, un examen plus poussé de la nature des polarités secondaires (types d’activités présentes, éloignement au centre…) peut permettre d’expliquer le « comportement » de tel ou tel pôle sur les déplacements.

La question des relations entre formes urbaines et mobilité ne se résume pas à l’étude des influences de la densité et du polycentrisme sur les pratiques de déplacements. La forme urbaine peut s’appréhender au travers d’une multitude de caractéristiques, à différentes échelles d’observation. Dans ce qui suit, on désignera par « usage du sol », tout ce qui est en rapport avec la caractérisation de la forme urbaine.