2. La nécessité d’un cadre d’analyse rigoureux

Nous ne pouvons pas envisager une étude de l’influence de la forme urbaine sur les coûts de la mobilité quotidienne sans contrôler ces facteurs par des variables socio-économiques. En effet, si ces dernières ne sont pas prises en compte, l’interprétation des résultats obtenus peut être biaisée. Par exemple, on sait que les caractéristiques socio-économiques des ménages sont fortement liées à la distance au centre, elle-même liée à la densité urbaine. Par exemple, sur l’enquête ménages de Lyon (2006), la densité humaine au secteur de tirage est fortement corrélée au nombre d’actifs du ménage comme au nombre d’enfants du ménage (les coefficients de corrélation de Pearson sont égaux respectivement à -0,52 et -0,60). Ainsi, dans les zones périphériques, la forte mobilité peut tout aussi bien s’expliquer par la faible densité que par le fort nombre d’actifs et d’enfants par ménage. Cet exemple montre combien il est important de décorréler les différents facteurs explicatifs des coûts de la mobilité. C’est pourquoi nous nous appuyons sur la base conceptuelle établie à la fin du chapitre II (illustration II-5). Nous considérons ici que les sous-systèmes de localisation (forme urbaine) et des relations sociales (caractéristiques socio-économiques) sont des inputs en interaction mutuelle et que le coût du système de transports est un output. Frank et Pivo (1994) ont envisagé un cadre conceptuel semblable mais dans lequel les interactions entre la forme urbaine et les caractéristiques des ménages ne sont pas prises en compte. Or il est essentiel de tenir compte de ces interactions pour déterminer quelle est la part de la mobilité expliquée par les caractéristiques du ménage et celle expliquée par la forme urbaine. La réponse à cette question va permettre de légitimer ou non certaines mesures d’aménagement urbain dont l’objectif est de maîtriser la croissance de la voiture dans les grandes agglomérations.

Cette représentation systémique de la ville est une forte simplification de la réalité. Nous ne prenons pas en compte un certain nombre de facteurs tels que le design urbain (Kitamura et al. 1997 ; Cervero, Kockelman, 1997 ; Frank et al. 2007) ou encore l’offre de stationnement (Ewing et al. 2007). Nous tentons néanmoins de bâtir un modèle explicatif de la durabilité du système de transports selon ce cadre d’analyse. Tout l’enjeu de cette partie est de contrôler les interactions mutuelles présentes entre les deux blocs de variable de l’illustration II-5 pour déterminer quelle est la part de la durabilité du système de transports expliquée par les caractéristiques socio-économiques et celle expliquée par les caractéristiques de la forme urbaine. Notre travail se construit en deux étapes :