5. Conclusions sur les résultats des modèles micro-économiques

Les résultats mis en évidence par les modèles généraux puis par type de ménages nous permettent de tirer quelques conclusions sur l’effet de la forme urbaine sur les coûts de transports.

Les modèles généraux ont montré que le type de ménage détermine davantage les dépenses de transports et les émissions de CO2 que les caractéristiques de la forme urbaine de résidence. Cependant, les effets tendent à s’équilibrer pour le taux d’effort des ménages. En revanche, le revenu annuel du ménage joue assez peu sur nos indicateurs de mobilité durable. En effet, la mobilité quotidienne est constituée de déplacements le plus souvent contraints (travail, achats, démarches) quelles que soient les ressources du ménage. Concernant les caractéristiques de la forme urbaine de résidence, la variable traduisant la proximité entre le domicile et les emplois des actifs du ménage s’est révélée la plus significative pour nos trois indicateurs. Vu sous cet angle, le défi principal des aménageurs serait donc aujourd’hui de lutter contre l’éloignement du domicile et de l’emploi (Korsu, Massot, 2006), qui s’avère très coûteux en termes de mobilité. La densité humaine, même si elle apparaît significative à plusieurs reprises, influe assez peu sur les résultats. En réalité, d’autres variables apparaissent plus significatives car elles traduisent mieux la proximité à certains services, ce qui signifie que la densité n’est pas un bon indicateur. En effet, lorsque la zone de résidence comporte des écoles, des commerces, des loisirs et des services à la personne, alors l’usage de la voiture est plus limité. On note l’absence des variables traduisant la spécialisation sectorielle d’une zone. En réalité, il n’y a pas une mais des spécialisations sectorielles, qui, selon les motifs de déplacement des ménages, peuvent être coûteuses ou bénéfiques. On note également l’effet significatif de l’offre des transports collectifs qui tend à limiter la vulnérabilité des ménages face aux coûts de transports. L’effet de cette variable est tout de même assez faible, de même que la densité. Une politique de bon agencement des localisation - qui ne peut être réalisée que dans le cadre d’une gouvernance globale à l’échelle de l’aire urbaine - doit donc nécessairement précéder une politique de densification et de renforcement de l’offre de transports collectifs.

L’analyse par couronne a mis en évidence l’influence des pôles secondaires sur la vulnérabilité des ménages et les coûts de la mobilité quotidienne en 3ème couronne. Les modèles montrent que le fait de résider dans un pôle indépendant et éloigné du centre limite les coûts de la mobilité. Les autres variables de proximité caractérisent uniquement le lieu de résidence à proximité directe du ménage. Un pôle apporte à ses résidents, à une échelle un peu plus large que la zone de résidence, un ensemble d’avantages propres à la centralité, c'est-à-dire une meilleure proximité à la population, aux services, et aux emplois mais également une meilleure accessibilité en transports collectifs. Il y a donc un intérêt certain à mieux organiser l’étalement urbain en favorisant le développement de pôles secondaires indépendants, ayant vocation à être bien desservis par les transports en commun, et reproduisant certains attributs de la centralité qui limitent des déplacements importants.

Les modèles catégoriels ont montré que les effets de la forme urbaine sont différenciés suivant les types de ménage. Si l’on prend l’exemple des actifs vivant seuls et des familles à un seul actif, l’examen de leurs motifs de déplacement montre que les premiers seront surtout sensibles à la proximité à l’emploi et à la présence de transports collectifs tandis que les seconds seront sensibles à la densité (proximité aux services diversifiés et à la population), à la présence d’écoles, d’établissements de santé, de commerces et d’activités de loisirs à proximité de leur domicile. Par conséquent, avant d’adopter telle ou telle mesure d’aménagement, il est important de regarder quel type de population est concerné.

Les analyses par couronne ont montré l’effet vertueux des pôles pour les actifs vivant seuls, les couples d’inactifs et biactifs et des familles biactives en 3ème et 4ème couronnes. Ces deux types de ménages ont des motifs de déplacement assez diversifiés. Les pôles permettent de contenir la mobilité des ménages qui seraient potentiellement les plus mobiles en leur absence. Cependant, le bénéfice qu’ils apportent dépend là encore du degré et du type de spécialisation. Plus ils proposent des services diversifiés et en adéquation avec les motifs de déplacement des ménages, et plus les dépenses globales de mobilité seront faibles.

Les modèles microéconomiques ont permis de dégager les principaux facteurs explicatifs de la mobilité des ménages au travers d’une étude sur les coûts. Cependant, ils ne permettent pas de réaliser des prévisions quantitatives des évolutions entraînées par les modifications de la forme urbaine sur la durabilité de la mobilité quotidienne des ménages. Quels peuvent être les bénéfices espérés par des mesures concrètes d’aménagement en termes de mobilité durable ?