Résumés |
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Cette recherche s’articule autour d’une hypothèse structurante : le sentiment de nature qui motive les randonneurs est un sentiment urbain. Aimer la nature, rechercher un contact physique avec elle, dépenser énergie et argent pour la parcourir et éprouver des sentiments extra-ordinaires, sont des actes qui s’inscrivent dans une trame culturelle moderne. Les excursionnistes du GR20 (Corse) et de la Chapada Diamantina (Bahia, Brésil) sont héritiers d’une histoire de l’idée de nature, d’une histoire de l’individu et d’une histoire du temps libre. Ils sont mus par un désir de nature, qui s’élabore dans le quotidien urbain, et dont les conditions pratiques d’émergence sont comparables. Mais la forme que prend le « rituel excursif » dans chacune des deux localités varie en fonction de structures sociales et de « mythes nationaux » distincts. On observe ainsi que les randonneurs français vivent avec force le « mythe de l’individu » (Miguel Benasayag), égalitariste et autonomiste, et que les randonneurs brésiliens performent une scène sociale hiérarchisée, qui les situe entre le guide qui les sert et la nature divinisée qui les dépasse. Dans les deux cas, une question politique peut être posée : le sentiment de nature n’a-t-il pas pour fonction impensée de masquer et de légitimer une « démocratie sélective » (Jessé Souza), qui s’articule à une dépolitisation du rapport à la nature- matière première ? |
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This research is articulated around a founding hypothesis: the feeling of nature that motivates the hikers is an urban feeling. Loving the nature, searching for a physical contact with it, spending energy and money to go through it and experience extraordinary feelings are all elements of the modern cultural weft. Tourists at the GR20 (Corsica) and at the Chapada Diamantina (Bahia, Brazil) inherited from the history of the idea of nature, from the history of the individual and from the history of free time in western civilization. They are moved by the desire of nature, which is worked out in the urban routine, and which emergence conditions are similar in both countries. However, the features of the « hiking ritual » in each of these places change according to their social structures and their « national myths ». In one hand, we can see how French tourists in Corsica experience and act the « myth of the individual » (Miguel Benasayag), fulfilled by equality and autonomy values. On the other hand, Brazilian tourists perform a hierarchical social scene, which places them between the guide who serves them and the natural divinity that overwhelms them. In both cases, a political question can be asked: does the feeling of nature hide and legitimate a « selective democracy » (Jessé Souza) that is connected to a depoliticization of nature as raw material ? |
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